Le pape et l'électricité
Au cœur des jours et des nuits
Le
pape et l’électricité
J’ai demandé à la
demoiselle de la réception pourquoi elle a aussitôt allumé toutes les lampes
alors qu’il fait plein soleil en plein midi. Elle m’a regardé l’air
étonné avant de daigner me répondre. Elle m’a dit que c’était pour
l’esthétique. Le mot est bien de sa bouche : l’esthétique. Si le mot a
trait à la beauté, je ne vois pas en quoi une lampe allumée en plein midi est
plus belle qu’autre chose. Les autres choses, justement, des meubles au mur et
des fleurs, ont besoin de lumière pour briller, pour bien apparaître. Et en
plein soleil de midi, la lumière est plus que suffisante pour faire resplendir,
faire éclater la beauté des êtres et des choses.
Mais la demoiselle
de la réception doit avoir appuyé sur l’interrupteur comme par réflexe. Chaque
jour qu’elle entre dans son bureau, elle appuie sur l’interrupteur. Et les
lampes restent allumées toute la journée et toute la nuit jusqu’au moment où
quelqu’un d’autre, on ne sait pas trop qui, passera les éteindre.
La demoiselle
allume aussi le poste téléviseur de la réception. Qu’elle regarde ou qu’elle ne
regarde pas. Qu’il y ait quelqu’un pour regarder ou pas. C’est comme s’il faut
du bruit pour vivre. Mais qui a dit que l’on vit mieux dans le bruit et la
lumière plutôt que dans le silence et la pénombre ?
La demoiselle de
la réception dit que c’est pour l’esthétique. Je pense plutôt qu’elle n’y pense
même pas, à l’esthétique. On ne discutera pas des goûts et des couleurs, mais
le bruit et la lumière, on peut en discuter. On doit même en discuter, parce
que les factures de la Société Nationale d’Electricité nous y obligent. Et
parce que les voisins et nous-mêmes souffrirons toujours du bruit et du manque
d’énergie. La Société Nationale d’Electricité procédera tout officiellement au
délestage, rationnant l’électricité par quartiers, par jours, par heures.
Dans la ville de
Kinshasa, beaucoup de lampes sont allumées du matin au soir, de jour et de
nuit, jusqu’au moment où quelqu’un, on ne sait pas trop qui, viendra les
éteindre. Et les robinets qui laissent couler de l’eau en permanence, jusqu’au
moment où quelqu’un, on ne sait pas trop qui, viendra les fermer.
Vivre dans l’insouciance
et la négligence est un péché. C’est d’abord un signe et une cause du
sous-développement, de l’irresponsabilité et du manque de liberté et de
bonheur. Je n’ai plus qu’à relayer le message du pape François. Il vient de
publier une lettre-encyclique portant sur l’écologie intégrale. Le pape parle
aussi de notre usage de l’eau et de l’électricité. Voici ce qu’il écrit :
« L’éducation à la responsabilité
environnementale peut encourager divers comportements qui ont une incidence
directe et importante sur la préservation de l’environnement tels que : éviter
l’usage de matière plastique et de papier, réduire la consommation d’eau, trier
les déchets, cuisiner seulement ce que l’on pourra raisonnablement manger,
traiter avec attention les autres êtres vivants, utiliser les transports
publics ou partager le même véhicule entre plusieurs personnes, planter des
arbres, éteindre les lumières inutiles. Tout cela fait partie d’une créativité
généreuse et digne, qui révèle le meilleur de l’être humain. Le fait de
réutiliser quelque chose au lieu de le jeter rapidement, parce qu’on est animé
par de profondes motivations, peut être un acte d’amour exprimant notre
dignité. » (Encyclique Laudato si,
numéro 211)
Jean-Baptiste MALENGE Kalunzu
jbmalenge@gmail.com
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