A qui le dernier mot ?
Au cœur des jours et des
nuits
A qui le dernier
mot ?
Les pharisiens, les scribes et les docteurs de
la loi, dans la Bible, auraient tout accepté sauf de laisser penser que Jésus
avait le dernier mot, que Jésus avait raison. Ils demandaient à Jésus de
prouver qu’il parlait au nom de Dieu. Et ils le guettaient justement pour
l’accuser de blasphème, pour l’accuser de se prétendre l’égal de Dieu. Un
pharisien comme Nicodème ne reconnut qu’en secret la grandeur de Jésus. Jésus
lui-même dira plus tard : Je suis le chemin, la vérité et la vie. Et bien plus
tard encore, Pilate lui posera la question : Qu’est-ce que la
vérité ? (Jean 18,38)
Combien, dans notre pays, reconnaissent-ils la
vérité de l’autre camp, de l’autre parti politique, de l’autre Eglise, de
l’autre religion ? Dans les médias et dans les autres lieux publics, on ne
s’écoute pas. Il est rare qu’on laisse spontanément aux autres l’occasion de se
présenter ou tout simplement de faire eux-mêmes le témoignage de ce qu’ils
croient, de ce qui est leur intime conviction. Les débats et autres dialogues
entre Congolais dégagent plus de chaleur que de lumière, comme le faisait
observer un diplomate étranger dans les années 1990.
Qui a le dernier mot ? On se trompe
justement en pensant qu’il s’agit de trouver le dernier mot, la dernière
vérité. Ce dont on a besoin, c’est de s’entendre sur une vérité acceptable,
l’avant-dernière vérité, si l’on peut dire, celle qui fera vivre ensemble,
celle qui éloignera la guerre.
Qui a raison et qui a tort ? On se posera
encore la question, jusqu’au moment dernier, au moment où Dieu lui-même, qui
est la vérité, en décidera ainsi. Mais comment le saurons-nous alors ? Et
qui écouterons-nous qui viendra parler au nom de Dieu ? Celui-là n’est pas
encore né, comme on dit si bien. Et si celui-là arrive à naître, viendra-t-il
du ciel ou de ce monde pour que les Congolais lui prêtent l’oreille ?
Pour ceux qui se méfient les uns des autres,
par expérience et avec raison, il ne s’agit pas de trouver la femme ou l’homme
compétent, intègre, au-dessus de tout soupçon. Le problème est dans le fait
même que les Congolais semblent avoir décidé de ne jamais faire confiance.
C’est-à-dire de ne jamais rien tolérer, rien accepter comme vérité, même pas
comme vérité avant-dernière. Les Congolais prétendent détenir chacun la vérité
absolue et ils s’épuisent, se chamaillent, s’entredéchirent pour s’imposer les
uns sur les autres. Dans la violence. Leurs débats se tiennent toujours à cor et
à cri, dans des vociférations, confondant la force du discours et le discours
de la force. En public et en privé, leur vie est généralement intimidation,
menace.
Dans l’histoire du pauvre Lazare et du riche
qui se rencontrent après la mort, sous l’arbitrage d’Abraham, la leçon peut
valoir pour le peuple congolais. Voici ce qui est écrit par saint Luc.
Le riche dit : Je te prie donc, père Abraham,
d'envoyer Lazare dans la maison de mon père; car j'ai cinq frères. C'est pour
qu'il leur atteste ces choses, afin qu'ils ne viennent pas aussi dans ce lieu
de tourments. Abraham répondit : Ils ont Moïse et les prophètes; qu'ils les
écoutent. Et il dit : Non, père Abraham, mais si quelqu'un des morts va vers
eux, ils se repentiront. Et Abraham lui dit : S'ils n'écoutent pas Moïse
et les prophètes, ils ne se laisseront pas persuader quand même quelqu'un des
morts ressusciterait. (Luc 16,27-31)
J’interprète : Les Congolais ne se font
pas mutuellement confiance, par expérience et pour de justes raisons. Même si
un ange tombait du ciel, rien ne dit qu’ils l’écouteront. Tout simplement parce
que l’ange, qui est un esprit, devra d’abord prendre corps, et les Congolais
qui le reconnaîtront alors se méfieront. Par principe. Sauf si cet ange est un
Blanc. Les Congolais le croiront, mais pour quelques jours.
Jean-Baptiste MALENGE Kalunzu
jbmalenge@gmail.com
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