Pâques 2012 : Message de Mgr Cyprien Mbuka, évêque de Boma


Mgr Cyprien Mbuka, évêque de Boma (RD Congo)
   Encourageons-nous les uns les autres dans les moments d’angoisse, de tristesse ; entraidons-nous dans les moments de manque et de pauvreté ; soutenons-nous dans les moments de crise.
Mgr Cyprien Mbuka a prononcé son homélie lors de la veillée pascale, le 7 avril, dans la cathédrale Notre-Dame de l'Assomption.


Message de Pâques 2012


« Nous espérions que c’était lui qui allait délivrer Israël… » (Lc 24, 21).

Chers frères et sœurs,
Joyeuses Pâques 2012 !
1.      C’est dans une atmosphère particulière que nous célébrons Pâques cette année. Les élections de novembre 2011 ont suscité pas mal d’insatisfaction, provoquant même divisions et méfiance parmi les citoyens. La pratique de la TVA a semé une certaine panique dans les milieux économiques, induisant l’augmentation du coût de la vie. La panne électrique généralisée dans le Bas-Congo a provoqué des deuils par ci par là à cause du manque d’eau qu’elle a entraîné. La menace du choléra plane sur nous. La prolongation inattendue de la petite saison sèche annonce une récolte maigre. Voila de quoi nous décourager. Certains n’hésitent pas à se demander si Dieu ne nous a pas abandonnés. Cette situation morose ressemble à celle vécue par les disciples du Christ après sa mort. « Nous espérions, disent-ils, que c’était lui qui allait délivrer Israël… » (Lc 24, 21).
Chers frères et sœurs,
2.      Dans mon Message de Noel 2011 j’ai parlé de la lumière. J’ai noté que Jésus est comme le soleil levant qui vient illuminer ceux qui habitent les ténèbres et l’ombre de la mort, pour conduire leurs pas au chemin de la paix  (cf. Lc 1, 79). A cette occasion, je vous ai invités à avoir le courage et l’audace de marcher sur le chemin illuminé par le Fils de Dieu, chemin de paix, de joie, de vérité, de justice et de liberté. La situation vécue présentement et que je viens d’évoquer plus haut m’invite à vous proposer comme thème de méditation pour la fête pascale de cette année : l’espérance. Il est vrai que nous avions déjà médité sur ce thème à Pâques 2009, mais les circonstances actuelles me poussent à y revenir, car « l'espérance ne déçoit pas » (Rm 5,5).
Bien-aimés du Seigneur,
3.      L’espérance traverse le message essentiel de la Parole de Dieu en cette veillée pascale et en ces jours de Pâques. En effet, le livre de la Genèse nous présente Dieu en train de faire insuffler la vie  dans le monde et dans tout ce qu’il renferme. Le livre de l’Exode nous relate la libération du peuple hébreu de l’esclavage en Egypte. L’Epitre aux Romains nous rappelle que par notre baptême nous sommes passés de la mort à la vie, des ténèbres à la lumière. Les Actes des Apôtres mettent en évidence la puissance de Dieu qui a ressuscité Jésus d’entre les morts. Les divers textes évangéliques apportent le même message : Celui que les Juifs ont crucifié et enterré est à jamais vivant, grâce à la puissance de Dieu. C’est donc avec raison que nous lançons des cris de joie : alléluia...Amen. Célébrer Pâques, c’est donc nous laisser envahir par l’espérance et devenir nous-mêmes aussi des témoins de l’espérance. Comme notre foi en la résurrection ne peut se fonder que sur le témoignage des premiers disciples,  c’est donc leur espérance qui peut nous aider à nourrir et à orienter notre propre espérance.  Je voudrais reprendre ici, comme en 2009, l’expérience des disciples d’Emmaüs dont nous parle l’évangile selon saint Luc dans la page lue lors de la messe du soir de Pâques.
Bien-aimés du Seigneur,
4.      Depuis l’arrestation de leur Maître, les disciples de Jésus sont dans la dispersion, dans le désarroi. Comme bien d’autres, les deux disciples s’éloignent de Jérusalem, découragés, déçus : « Nous espérions, disent-ils, que c’était lui qui allait délivrer Israël… » (Lc 24, 21). C’est sur cette route du désespoir qu’un voyageur inconnu les rejoint. Il leur pose des questions saugrenues, mais les deux disciples d’Emmaüs lui répondent quand même avec beaucoup de respect. Il leur explique les Ecritures d’une façon convainquante.  Au départ agaçant, cet intrus devient pour eux par la suite un compagnon de route, un ami avec qui ils souhaitent passer la nuit. Et lorsque l’inconnu rompt le pain, le partage et le leur donne, ce geste leur fait découvrir leur Maître. Du coup, c’est fini le découragement et le désespoir, la menace de la  résignation disparaît, la soirée n’est plus pesante mais paisible, les graines de l’espérance germent déjà dans leurs cœurs. Et pourtant, Jésus ne leur a porté ni or ni argent ; il ne leur a rien laissé matériellement. Au contraire, affirme l’évangéliste, dès que leurs yeux s’ouvrirent et qu’ils le reconnurent, déjà il avait disparu (cf. Lc 24, 31). Que s’est-il donc passé pour que ces disciples en arrivent à se débarrasser de la tristesse et du désespoir et à devenir si joyeux et pleins d’espérance ? Le fait de constater que leur Maître était vivant, signifiait pour eux que Dieu l’avait glorifié à cause de ses œuvres (cf. Jn 20, 23) ; c’est donc, Lui, Jésus qui avait raison. Cette victoire ne pouvait que susciter la joie dans les cœurs des disciples. Si donc le Christ est ressuscité, la dernière parole de l’histoire n’est ni la souffrance ni la mort, mais l’espérance. Heureux donc celui qui suit le Christ, il sera lui aussi  honoré par Dieu (cf. Jn 20, 26).
5.      Comme on peut le constater, une souffrance, même imméritée, une fois assumée dans la foi, est don de soi et génératrice d’espérance, mais subie, elle conduit au découragement et au désespoir. Oui, l’espérance protège du découragement ; elle soutient en tout délaissement ; elle est une arme qui protège dans le combat du salut ; elle préserve de l'égoïsme et conduit à la charité ; elle procure la joie dans l'épreuve.

Chers frères et sœurs,
6.      Celui qui est habité par l’espérance est prêt à  répandre la joie du Christ ressuscité. A l’instant même, dit l’évangéliste, les disciples d’Emmaüs se levèrent et retournèrent à Jérusalem où ils racontèrent avec joie aux autres disciples comment ils avaient reconnu le Maître lorsqu’il avait rompu le pain. Libérés de toute déception, ils marchent résolument et joyeusement sur la route de l’espérance où leur Maître les ramène. Vivre l’expérience de la résurrection du Seigneur invite à ne pas croiser les bras, à ne pas chercher le cadavre du Christ dans le tombeau, mais à aller vers les autres pour être des témoins de l’espérance. Ce message de Pâques doit susciter en nous une manière nouvelle de réagir devant les situations qui marquent notre vie quotidienne. Quelle parole d’espérance pouvons-nous apporter aux situations pénibles que nous vivons ? Rappelons-nous l’attitude des disciples d’Emmaüs après la rencontre avec le Christ ressuscité : se rendre en toute hâte à Jérusalem pour partager avec les autres la joie d’avoir rencontré le Maître. Nous aussi, sortant des lieux de culte et imprégnés du message de Pâques, hâtons-nous d’aller susciter l’espérance autour de nous, et dépêchons-nous de provoquer les autres à être eux aussi témoins de l’espérance. Notre réussite ne viendra pas des moyens dont nous disposons ni des applaudissements pour nous, mais des exemples concrets que nous aurons apportés qui, forcément, déposeront dans les cœurs des hommes et des femmes de bonne volonté des graines d’espérance qui germeront tôt ou tard.
Chers frères et sœurs,
7.      L’espérance s'exprime et se nourrit dans la prière. Pour soutenir notre espérance il nous faut mettre en place différentes actions appelées à dépasser les intérêts particuliers pour oeuvrer dans la perspective du bien commun. Tout comportement humain droit et juste est espérance en action. Un bon exemple concret est une preuve irréfutable que le changement est possible, qu’il est possible d’aller de l’avant. Le découragement est combattu par le courage, les pleurnicheries par l’engagement, la résignation par l’audace. La provocation du prochain à une bonne action ne sera efficace que par des exemples concrets de notre implication personnelle. Et même si nous n’y arrivons pas, au moins quelque part nous aurons fait un pas vers l’annonce de la Bonne Nouvelle en jetant des bases pour une action à moyen ou à long terme. Pour passer de la promesse de vie au fruit, la seule voie possible est d’être capable de se donner aux autres par amour ou de mourir par amour pour eux. Jésus l’a dit lui-même : « Si le grain de blé tombé en terre ne meurt pas, il reste seul ; mais s’il meurt, il donne beaucoup de fruit…» (Jn 12, 24-25). L’espérance nous pousse a une critique vigilante face aux situations vécues mais aussi a un accueil avec confiance des attentes des hommes en les orientant vers la nouveauté  et le bien.
Bien-aimés du Seigneur, 
8.      Encourageons-nous les uns les autres dans les moments d’angoisse, de tristesse ; entraidons-nous dans les moments de manque et de pauvreté ; soutenons-nous dans les moments de crise. Avec saint François d’Assise, prions :
Là où il y a de la haine, que je mette l’amour.
Là où il y a l’offense, que je mette le pardon.
Là où il y a la discorde, que je mette l’union.
Là où il y a la tristesse, que je mette la joie.
Là où il y a le désespoir, que je mette l’espérance.
9.      C’est de cette manière que nous pourrons mettre en pratique notre thème pastoral de ces années, qui nous invite à être des chrétiens adultes et engagés pour bâtir au mieux nos CEVB et notre pays ».
Bien-aimés du Seigneur,
10. C’est par cette note d’espérance que je termine ce message. Je vous souhaite tous de célébrer les fêtes pascales dans la joie et l’espérance. Alléluia ...Amen!

            Donné en l’Eglise cathédrale Notre Dame de l’Assomption,
Veillée pascale,  Boma, 07 avril 2012
Mbuka Cyprien, cicm
Evêque de Boma

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