L’enfant et les chips de l’église



Au cœur des jours et des nuits
L’enfant et les chips de l’église


Quelle chance pour cet enfant de quatre ans ? Il voit le curé de la paroisse arriver chez lui à la maison. Il l’a bien reconnu, même si le curé ne porte pas les vêtements qu’il a à la messe. Surtout, lorsque le prêtre a parlé, sa voix était bien la sienne. L’enfant avait déjà confié à son cousin que le prêtre parlait comme Dieu. L’enfant était nouveau dans le quartier, et dans l’Eglise catholique. Il avait bien des choses à découvrir. Bien des choses l’émerveillaient. A chaque fois, il ne cachait pas son étonnement. Un étonnement comme celui de la philosophie, lorsque l’intelligence s’interroge sur tout ce qui nous entoure.

Et cet enfant ruminait un mot personnel à dire au prêtre. Un mot concernant les chips de l’église. L’enfant avait voulu en bénéficier lui aussi. Il avait payé de l’argent, disait-il, mais le curé n’avait pas daigné lui en donner comme à d’autres. L’enfant avait pensé que le curé était injuste, mais comment protester ? Et voilà donc la chance inouïe lorsque le prêtre lui-même vient vers l’enfant.


C’est toi qui vends les chips ? demanda l’enfant. Le prêtre ne pouvait pas comprendre la question. L’enfant ajouta qu’il avait bien payé l’argent nécessaire, mais qu’il n’avait pas compris pourquoi, le moment venu, le prêtre avait servi tout le monde sauf lui. Est-ce parce qu’il était nouveau dans le quartier et que le prêtre ne le connaissait pas personnellement ?

Le cousin de l’enfant, l’a relayé aussitôt pour expliquer au prêtre que l’enfant parlait de la sainte communion et pas de chips ni de biscuits. A neuf ans, le cousin avait fait sa première communion, et le dimanche, il allait dans la file, devant le prêtre, il tendait ses mains ouvertes, et le prêtre lui donnait l’hostie. Mais lorsque l’enfant de quatre ans, nouveau dans l’église et dans le quartier, avait suivi son cousin, le curé, vigilant, l’avait fait écarter. D’où la rancune, la colère de l’enfant. 

Et puisqu’il avait eu maintenant le courage et la sincérité d’en parler, le prêtre lui expliqua que personne n’avait acheté la communion, que Dieu se donnait tout gratuitement à celui qui s’était préparé à le recevoir dans son coeur. L’enfant dit qu’il s’était bien préparé dans son cœur. Le curé rétorqua qu’avant l’âge de neuf ans, personne n’est reçu à la communion et que l’Eglise le veut ainsi. L’enfant, sincère, dit alors qu’il ne donnerait plus jamais de son argent. Le prêtre reprit que personne n’achète Dieu qui se donne gratuitement à celui qui se prépare à le recevoir dans son cœur.

Le curé m’a dit bien après que cette discussion avec l’enfant lui avait ouvert les yeux. Dans sa paroisse, il doit y en avoir beaucoup qui croient acheter Dieu avec leur argent. Le curé m’a dit qu’il limitera désormais la durée de la collecte des offrandes et surtout la danse et la procession. Parce que certains se sont déjà trompés en pensant que le point culminant, le centre de la messe, c’est le moment des offrandes et de la danse. Le curé m’a dit de rappeler à tout le monde, si je le peux, que le sommet et le centre de la messe, c’est la consécration, le moment où le pain devient le corps du Christ et le vin devient le sang du Christ. Le curé se rappelait que dans son enfance, à ce moment-là, dans les églises, un policier jouait du clairon.

Jean-Baptiste MALENGE Kalunzu
jbmalenge@gmail.com

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