Les papas "veuves"

Au cœur des jours et des nuits
Les papas « veuves »


Un orphelin et son père veuf (lui-même orphelin de père et de mère)
Vous avez bien lu. Vous auriez pensé plus correct de parler des veuves en pensant à des femmes, et des veufs, pour les hommes. Mais il ne s’agit pas ici d’une leçon de grammaire française. Ici, il s’agit d’une revendication grave. Le cuisinier du curé de ma paroisse plaidait en faveur de ceux qui étaient comme lui. Il a dit « papas veuves », parce que, dans les propos du curé et de bien d’autres, dans l’Eglise, on ne pense souvent qu’aux « mamans veuves ». Et le cuisinier veuf demandait donc que justice soit faite, pour lui-même et pour tant d’autres qui sont dans sa condition. Pourquoi n’y a-t-il pas de papas veuves ? a-t-il demandé.


Si vous lisez la Bible, comparez combien de fois reviennent, respectivement, le mot « veuve » et le mot « veuf ». Vous n’avez pas besoin de compter. Je l’ai fait pour vous. Le mot « veuve » est mentionné 95 fois, soit 66 fois dans l’Ancien Testament et 29 fois dans le Nouveau. Et le mot veuf ? Aucune fois. Ni dans l’Ancien ni dans le Nouveau Testament. Vous pouvez vérifier si vous ne me croyez pas. Vous ne me croyez pas parce que vous pensez que la veuve est une personne malheureuse dont il faut avoir pitié, et Dieu, dans la Bible, s’occupe des malheureux. Et la misère et l’isolement de la veuve crient au secours, et Dieu répond.
Question : Dieu a-t-il oublié les hommes, lui qui a recommandé qu’un homme quitte son père et sa mère pour faire une seule chair avec une femme ? Et Dieu ne verrait-il pas ces hommes malheureux, inconsolables qui pleurent leurs femmes ? Dieu ne verrait-il que les veuves ? La situation juridique et matérielle de la veuve était bien précaire dans la société juive de l’Ancien Testament. Aujourd’hui, si une femme doit élever seule des enfants, la situation n’est pas facile pour elle. Mais ces orphelins sont-ils plus orphelins que ceux qui ont perdu leur mère et qui doivent dépendre de leur père ? Pensez à un homme de mon pays qui doit élever seul ses jeunes enfants en assurant lui-même les tâches ordinairement attribuées à la femme : piler le manioc, ramasser du bois, préparer la nourriture, baigner les bébés, par exemple. Un tel homme est à plaindre. Dieu et toutes les bonnes âmes doivent s’occuper de lui. Le cuisinier veuf avait donc raison de s’inquiéter et de demander au curé de faire justice à lui-même et à tant d’autres qui sont comme lui obligés d’élever des enfants sans leur mère et de surmonter le vide affectif que laisse la femme aimée.
Tout le monde semble ne s’occuper que des femmes et jamais des hommes. Des gouvernements des Etats modernes ont même parfois créé des ministères pour s’occuper de la femme. Et la condition masculine est devenue malheureuse, comme chantait le Camerounais Francis Bebey.
Des Organisations, il y en a de plus en plus pour s’occuper des femmes violées, des femmes battues. Pour les soigner, les protéger. Des mouvements de jeunesse existent aussi pour protéger les jeunes filles et les éduquer, les éclairer sur leurs droits. Mais personne ne s’occupe des violeurs et des voyous et violents qui maltraitent les femmes. Lorsqu’on s’occupe d’eux, c’est pour les réprimer, les arrêter, les emprisonner, les punir, les torturer même. Un jour, la Cour Pénale Internationale aussi s’occupera d’eux. Mais pourquoi ne se charge-t-on pas d’éduquer les garçons pour leur apprendre le respect de la femme et le respect d’eux-mêmes ?
Le veuf cuisinier de mon curé aura eu le mérite de faire réfléchir. Comme il existe le mouvement des « mamans catholiques » fondé par le cardinal Joseph-Albert Malula à Kinshasa, le curé de ma paroisse attend de voir celui qui fondera un jour le mouvement des « papas catholiques ». Pour aider et éduquer les hommes. Et pour réfléchir sur la condition masculine.
Jean-Baptiste MALENGE Kalunzu

jbmalenge@gmail.com

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