Martyr pour un coup de foudre
Au cœur des jours et des
nuits
Martyr pour un coup de foudre
Mon ami enseignant de physique à l’école secondaire de son village
se réjouit d’ores et déjà d’un grand événement de l’Eglise qui va se dérouler
en Afrique du sud. L’événement, c’est la béatification, le 13 septembre, de Benoît
ou Benedict Daswa. Ce nom vous est inconnu. Mais son histoire, vous direz la
connaître si je vous apprends que cet enseignant et catéchiste ne croyait pas et
qu’il a fait savoir fermement qu’il ne croyait pas que la foudre qui tombe sur
un village est une œuvre de sorciers.
L’histoire de Benedict Daswa vous concerne, donc. Tout au moins, vous
connaissez des personnes qui croient dur comme fer, depuis leur enfance, qu’un
être humain peut vous envoyer la foudre, comme on dit dans ma langue
maternelle. La foudre qui brûle et qui tue. Et vous savez que des personnes qui
croient dur comme fer à la force magique, vous ne pouvez pas les convaincre du
contraire.
Mon ami professeur de physique l’a tenté dans son village. Il a
donné une conférence devant des enseignants, des élèves et toute la commission
paroissiale des intellectuels. Il a expliqué ce que chacun d’eux doit avoir
appris dès l’école primaire. Par exemple : le négatif et le positif de
piles qui se croisent pour faire la lumière dans une lampe de poche ou pour
allumer un poste de radio.
Dans sa conférence, mon ami a expliqué que les fréquentes foudres
qui tombaient sur le village n’étaient pas le fait de sorciers mais le résultat
tout simple de phénomènes naturels. Et mon ami a signalé que le colonisateur
avait planté deux paratonnerres que tout le monde pouvait voir aux bouts du
village.
La conférence était claire, en des termes simples et concrets. Mais
beaucoup n’ont pas cru mon ami professeur de physique. Ils ont cru ce qu’ils
ont toujours cru, depuis leur enfance : la foudre provient d’un sorcier.
Et le sorcier peut vous jeter la foudre à la figure comme un colis ou une
pierre.
Mon ami avait tenu sa conférence parce que l’opportunité était là. Un
responsable d’Eglise avait prétendu avoir tellement nettoyé, purifié le village
que plus personne, disait-il, n’entendrait plus jamais parler d’un coup de
foudre. On était en saison sèche. Et mon ami parla pour prévenir l’arrivée des
premières pluies. Elles s’accompagnent de vrais tempêtes et tonnerres.
Mon ami professeur de physique n’a pas été écouté. Je l’ai dit. Mais
mon ami n’a pas connu le sort de Benedict Daswa. Benedict Dawa est né en 1946.
Il a reçu le baptême dans l’Eglise catholique en 1963. En novembre 1989,
l’enseignant et catéchiste sud-africain avait expliqué que les fréquentes foudres
survenues dans son village étaient des forces naturelles. Les notables du
village avaient entrepris une collecte d’argent pour calmer les sorciers.
Benedict Daswa avait refusé de contribuer à la collecte d’argent.
Benedict Daswa avait une seconde raison. Il avait dit qu’il était
chrétien et qu’il ne croyait donc pas ce que le village racontait sur la foudre
et les sorciers. Puisqu’il s’opposait à la croyance du village, le 10 février
1990, de jeunes gens lui ont tendu un piège sur la route. Ils l’ont battu à
mort. Et le 23 janvier 2015, le pape François a reconnu le martyre et demandé
que Benedict Daswa soit béatifié comme « martyr de la foi ».
Benoît Daswa est un martyr de la foi que ne partagent pas ces
Africains qui croient n’importe quoi. Un jour, un pape ne manquera pas de
béatifier un polygame repenti. Mais c’est une autre histoire. La religion
chrétienne n’est pas une question de morale ni de politique. Elle est d’abord
une question de foi. Que croyez-vous ? En qui croyez-vous ?
Vous attribuez à la magie, à la sorcellerie ou à l’occultisme tout
ce qui vous dépasse. Vous écoutez peut-être chaque jour des prêtres et des
pasteurs qui ne prêchent que sur la sorcellerie dont ils prétendent vous
délivrer. Vous portez des chapelets et des médailles et vous utilisez l’eau
bénite comme des objets magiques. Vous êtes un païen, sans le savoir, sans vous
l’avouer.
L’histoire de Benedict Daswa vous est lointaine parce que, vous, au
moins, personne ne vous a jamais obligé de croire. Personne n’a jamais porté la
main sur vous.
Jean-Baptiste
MALENGE Kalunzu
jbmalenge@gmail.com
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