Jeudi Saint : Méditation proposée par Hortense MASINA Inana


JEUDI SAINT
LA CÈNE DU SEIGNEUR
Méditation proposée par Hortense MASINA Inana


Le jeudi saint est le jour qui nous introduit dans la célébration du mystère pascal, centre et sommet de l’histoire du salut. Les symboles, les paroles, les silences, la musique et les lectures de la liturgie nous accompagnent et nous font entrer dans le mystère de Pâques. Toutes les lectures de ce jour se concentrent sur le thème de la Cène pascale. La première lecture (Ex 12,1-8.11-14) nous raconte les origines de la Pâque juive ; la seconde, extraite de la première lettre de Saint Paul aux Corinthiens (1 Cor 11,23-26), nous parle de l’Eucharistie ; l’évangile nous rapporte le lavage des pieds (Jn 13,1-15).

Le texte de l’Exode (12,1-8.11-14) nous rappelle la Pâque juive, qui a eu lieu lorsque Dieu avait choisi Moïse pour libérer son peuple de l’oppression du Pharaon en Egypte et pour le guider vers la terre promise. La dernière des dix plaies annoncées par Moïse, à savoir la mort des premiers-nés dans tout le pays d’Égypte, avait affaibli la dureté du cœur du Pharaon qui avait ainsi permis le départ des enfants d’Israël (Exode 12, 31-32). Israël était exclu de ce terrible fléau pour avoir reçu et obéi à la Parole de Dieu : le sang d’un agneau, tué quelques heures avant la réalisation du dernier fléau, placé sur les deux montants et sur le linteau de la porte d’entrée sauve ses premiers-nés. Le rite devait ensuite se répéter chaque année en mémoire de cette fête où Dieu passa en sauvant son peuple : « C’est la Pâque du Seigneur » (Es 12,11).

Jésus choisit la célébration de la Pâque juive pour établir la nouvelle Pâque, dans laquelle il est le véritable « agneau pascal » immolé et consommé pour le salut du monde. Et tandis qu’il s’assied à table avec ses disciples, il commence le nouveau rite de sa Pâques. En fait, « le Seigneur Jésus, la nuit où il était livré » - nous dit la deuxième lecture (1 Cor 11,23-26) - « prit du pain et, après avoir rendu grâce, le rompit et dit : « Ceci est mon corps, qui est pour vous ; faites ceci en mémoire de moi. De même, après le repas, il prit la coupe, en disant : « Cette coupe est la nouvelle Alliance en mon sang ; chaque fois que vous en boirez, faites-le en mémoire de moi ». Ce pain miraculeusement transformé en Corps du Christ et cette coupe qui ne contient plus du vin mais le Sang du Christ offert pour le salut de tous les hommes, étaient cette nuit-là l’annonce et l’anticipation de la mort du Seigneur dans laquelle il verserait tout son Sang ; et sont aujourd’hui le mémorial vivant de son sacrifice : « Faites ceci en mémoire de moi ».

C’est dans cette optique que Saint Paul présente l’Eucharistie quand il dit : « Chaque fois en effet que vous mangez ce pain et que vous buvez cette coupe, vous annoncez la mort du Seigneur, jusqu’à ce qu’il vienne ». L’Eucharistie est le « pain vivant » qui donne la vie éternelle aux hommes (Jn 6, 51), parce qu’elle est le « mémorial » de la mort du Christ, parce que c’est son Corps « donné » en sacrifice, c’est son Sang « versé pour une multitude en rémission des péchés » (cf. Lc 22,19 ; Mt 26,28). Nourris du Corps du Christ, aspergés et lavés par son Sang, les hommes peuvent supporter la dureté du voyage terrestre, passer de l’esclavage du péché à la liberté des enfants de Dieu, de la traversée pénible du désert à la terre promise : la maison du Père.

« Prenez et mangez-en tous : ceci est mon Corps ... Prenez et buvez-en tous : ceci est la coupe de mon Sang » (Missel Romain). Si l’habitude a diminué la vivacité de la foi des croyants, la liturgie d’aujourd’hui invite à se secouer, à pénétrer d’un regard plus profond et affectueux la réalité ineffable du mystère qui s’est accompli pour la première fois dans la chambre haute, le Cénacle, sous le regard étonné des douze apôtres et qui se renouvelle aujourd’hui avec la même concrétisation sur nos autels. C’est toujours le Seigneur Jésus qui, en la personne de son ministre, fait le geste de consécration et, en ce jour où nous commémorons l’institution de l’Eucharistie et la veille de la mort du Seigneur, ce geste acquiert une actualité impressionnante.

Jésus « ayant aimé les siens qui étaient dans le monde, les aima jusqu’à la fin », dit Saint Jean en introduisant le récit de la Cène du Seigneur (3ème lecture : Jn 13, 1-15) ; « le Seigneur Jésus, la nuit où il était livré », explique saint Paul, se référant à l’institution de l’Eucharistie. Contraste énorme : le Christ nous offre un amour infini, « jusqu’à la fin », jusqu’à la mort ; et pourtant les hommes lui offrent trahison, déni, abandon. L’Eucharistie est la réponse du Seigneur à la trahison des hommes. Il est impatient de sauver les hommes si faibles et si infidèles, et il anticipe mystiquement sa mort en nous offrant comme nourriture son Corps qu’il sacrifiera bientôt sur la croix et son Sang qu’il versera jusqu’à la dernière goutte. Et si dans quelques heures la mort l’arrache à la terre, l’Eucharistie perpétuera sa présence vivante et réelle jusqu’à la fin des siècles.

Mais avec ce rite de la nouvelle Pâques, Jésus laisse aussi le testament de l’amour à l’Église : son « commandement nouveau ». Soudain, les Douze voient le Maître s’agenouiller devant eux dans l’attitude d’un serviteur : « il se lève de table, dépose ses vêtements, et prenant un linge, il s’en ceignit. Puis il met de l’eau dans un bassin et il commença à laver les pieds des disciples et à les essuyer avec le linge dont il était ceint » (Jn 13,4-5). La scène se termine par un avertissement : « Si donc je vous ai lavé les pieds, moi le Seigneur et le Maître, vous aussi vous devez vous laver les pieds les uns aux autres » (Jn 13,14). Il ne s’agit pas tant d’imiter le geste matériel, mais plutôt l’attitude d’humilité sincère dans les relations mutuelles, en se considérant et en se comportant comme des serviteurs les uns des autres. Seule cette humilité permet d’accomplir le commandement que Jésus nous donne : « Je vous donne un commandement nouveau : vous aimer les uns les autres ; comme je vous ai aimés, aimez-vous les uns les autres » (Jn 13, 34).

Le lavage des pieds, l’institution de l’Eucharistie, la mort sur la croix nous indiquent comment et dans quelle mesure il  faut aimer nos frères pour mettre en œuvre le commandement du Seigneur. Jésus nous dit aujourd’hui : « Aimez-vous comme je vous ai aimés », si nous ne nous aimons pas, si notre vie ne devient pas la voie de l’amour, nous ne sommes pas nous-mêmes, en quelque sorte nous renonçons à notre véritable identité : celle d’être porteurs de l’amour de Dieu.

Commentaires

  1. Merci Hortense pour cette méditation riche de référence biblique et surtout de manière dont tu nous invites à actualiser l'eucharistie dans notre vie quotidienne. Bon tridum pascal à toi.

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