Les nouvelles technologies de l’information et de la communication et l’accompagnement spirituel
(Texte de la conférence prononcée à Kinshasa le 30 mai 2013 lors du deuxième colloque sur la formation des formateurs organisé par l’Institut Supérieur de Pédagogie Religieuse).
Comment l’accompagnement spirituel peut-il constituer un lieu d’acheminement vers l’intériorité et donc la croissance dans un monde où les moyens de communication sociale ou les nouvelles technologies de l’information et de la communication (l’internet, le téléphone, la radio, la télévision, l’ipad, la tablette, etc.) sont plutôt réputés pour le bruit, la dispersion, l’indiscrétion, la distraction, la relativisation, bref la superficialité ? Voilà comment je comprends le sujet qui m’a été proposé.
Je voudrais commencer par quelques faits divers. En journalisme, on appelle faits divers ou chiens écrasés ces menus événements de la vie ordinaire qui portent un sens lorsqu’on les reçoit dans un certain contexte qui les relie à l’universel. L’ordinaire devient ainsi extraordinaire et vice-versa. Vous pouvez penser ainsi aux paraboles de Jésus. Elles rapportent de petits faits de la vie ordinaire et pointent néanmoins vers le Royaume des cieux.
1. Des faits divers comme tant d’autres
Il y a deux ans, je passais à la télévision pour présenter l’émission religieuse catholique « Le Jour du Seigneur » produite par la Commission épiscopale des communications sociales. Un jour, une demoiselle d’un village du Kasaï-Occidental m’a sollicité pour devenir son accompagnateur spirituel. Elle se disait aspirante. C’était au téléphone. J’ai décliné l’offre (ou la demande) en expliquant que le téléphone coûtait trop cher. Je conseillais de chercher ailleurs, dans son environnement immédiat.
Et voilà quelques mois, c’est une jeune dame de Yaoundé au Cameroun, qui me fait la même demande. Cette fois, c’est par e-mail. En repoussant l’ « avance », j’expliquai que la distance physique nous empêcherait toute communication digne du genre particulier qu’exige l’accompagnement dit spirituel. Je pensais sans doute au règlement des séminaires. Et à la pratique de maîtres spirituels de l’histoire qui insistent sur la présence physique indispensable.
Mais je connais aussi le cas d’une religieuse qui a sollicité et obtenu au téléphone, un soir, le conseil qui l’a décidé à renouveler ses vœux temporaires le lendemain matin alors que traversant une crise aiguë pour son âge, elle pensait renoncer à tout ce soir-là. Il n’y avait pas de présence physique auprès d’un accompagnateur, mais le téléphone a sauvé sa vocation. Ses supérieures ne savaient même pas que la jeune religieuse détenait un téléphone, toujours placé sur vibreur et jamais utilisé qu’entre 21H00 et minuit.
Voilà mes trois faits divers. Ils portent un sens. Il y a vingt ans, de tels cas seraient peut-être survenus par courrier, mais qui pouvait savoir si des regards curieux n’auraient pas eu la tentation de lire les lettres ? Il y a vingt ans, beaucoup parmi nous n’avaient pas encore connu le téléphone. Et n’oubliez pas que l’internet public vient tout juste de fêter ses vingt ans d’âge ! Nous sommes entrés aujourd’hui dans une nouvelle ère dite l’ère de la communication.
Peut-on organiser l’accompagnement spirituel par téléphone ou par internet, la question a certainement déjà trouvé la réponse négative dans les règles du droit canonique ou dans les explicitations des fondements de la théologie morale ou dogmatique. Pour faire une analogie, dans l’état actuel des normes et des pratiques, en effet, vous ne devrez pas recevoir par téléphone l’absolution du prêtre auquel vous confessez vos péchés. De même, ne croyez pas avoir participé à la messe lorsque vous avez assisté à une retransmission télévisuelle.
Je suggère déjà qu’il faut préférer, si possible, de considérer les moyens de communication sociale comme des avantages. Un tel regard positif, optimiste est suggéré à l’Eglise déjà en 1963 depuis le concile Vatican II dans le décret Inter mirifica sur les moyens de communication sociale. La communication doit être un lieu de croissance spirituelle parce que nous devons nous inscrire dans la culture médiatique pour y vivre des valeurs de vérité, de confiance en soi et en l’autre, et en Dieu.
Les nouvelles technologies de l’information et de la communication ont apporté de nouvelles questions et demandent d’inventer de nouvelles manières de concevoir la vie, la vie spirituelle, la vie consacrée et l’accompagnement spirituel. D’une génération à l’autre, nous devons inventer, imaginer de nouvelles manières d’initier à la même exigence séculaire de la consécration à Dieu par le baptême ou par les vœux de religion. Mais à chaque génération correspondent des moyens nouveaux, un esprit nouveau, une culture nouvelle.
Je voudrais me contenter de l’aspect primordial, au sens fondamental, de la vie consacrée, la vie communautaire dans son articulation avec la vie privée et intime. Je peux reformuler donc à ce niveau-ci mon propos : l’importance et la nécessité de l’accompagnement spirituel dans l’usage des moyens de communication sociale en vue de la vie communautaire.
Mais situons-nous d’abord dans le temps. Nous sommes en présence d’une nouvelle génération et d’une nouvelle culture.
2. Nouvelle génération, nouvelle culture
En regardant les participants au présent colloque, je me suis rendu compte que la sage Tradition africaine est bien respectée : la plupart des formatrices et formateurs sont des anciens, des aînés.
C’est bien un avantage que nous donne l’âge pour accompagner avec autorité de jeunes frères et sœurs en Christ. Mais la sagesse biblique nous dit, à nous les aînés, qu’il faut naître de nouveau, qu’il faut se convertir, ressembler à des enfants, sous peine de ne pouvoir entrer dans le Royaume du Seigneur. Et ne soyons pas de ces aveugles qui prétendent en conduire d’autres sans connaître eux-mêmes le chemin, parce qu’ils n’ont pas opéré de mise à jour (automatique ou manuelle, spontanée ou voulue) Ils ne comprennent peut-être rien lorsqu’on leur parle de facebook, de twitter, de blog, d’e-mail, de smarthphone, de tablette, etc.
J’ai entendu dire ici que nous sommes tous en croissance, que nous avons besoin d’être accompagnés. Lorsque l’âge nous fait traverser des crises à cause de nouvelles technologies qui nous dépassent, il ne faut pas choisir le suicide, il faut se former.
Si vous avez fini votre formation première il y a cinq ans, c’est-à-dire en 2008, à moins de naître de nouveau dans l’ère de la communication, vous appartenez à une autre génération que celle de vos novices, junioristes ou scolastiques. En 2008, ici à Kinshasa, l’internet mobile n’était pas courant. Aujourd’hui, en attendant la fibre optique, nous avons même déjà sur nos téléphones la 3G (la troisième génération), le haut débit. La publicité d’Airtel se targue d’offrir l’internet supersonic… A très grande vitesse.
Si vous n’êtes pas habitué à l’internet, vous savez au moins que l’on peut toucher son salaire aujourd’hui grâce au téléphone mobile : Airtel Money, M-Pesa de Vodacom, ou de Tigo cash, par exemple. La bancarisation des salaires des fonctionnaires serait inconcevable sans cette nouvelle technologie, inimaginable voilà quelques années.
Si vous avez fini votre formation première il y a dix ans, en 2003, à moins de naître de nouveau dans l’ère de la communication, vous êtes franchement d’une vieille génération. Du temps de votre formation, les résultats des examens d’Etat par internet et par sms étaient inimaginables.
Et si vous avez été formés avant l’an 2000, à moins de naître de nouveau dans l’ère de la communication, vous appartenez alors à la préhistoire. Du temps de votre formation, vous n’avez pas eu de téléphone portable personnel. Et il est fort possible que vous n’ayez pas eu d’adresse e-mail. Parce que l’internet n’existait carrément pas chez vous et que vous n’en aviez même jamais entendu parler.
Dans le domaine des technologies de l’information et de la communication, le progrès est toujours rapide. Le pape Jean-Paul II l’a fait remarquer en 2005. Le progrès est tellement rapide que personne ne peut prévoir ce qu’il y aura en la matière dans cinq ans. Même pas l’année prochaine, d’ailleurs. Cinq ans, c’est donc toute une nouvelle génération. Des systèmes des ordinateurs auront vieilli, et l’avenir nous réserve bien d’autres surprises.
Alors, veillez à ce que les jeunes dont vous vous occupez ne vivent pas dans un autre univers que le vôtre. Vous ne pouvez pas les changer. C’est à vous à changer.
Je range volontiers parmi les marques de la nouvelle culture chez nous ce « relâchement » dans la pratique des langues. Ni le français, langue officielle, ni les quatre langues nationales, sans parler des autres, ne sont tenus dans une certaine rigueur. Le résultat, malheureusement, est ce qui s’appelle à Kinshasa le « lingala facile ». Les enseignants du français à l’école primaire de mon vieux temps n’en reviendraient pas sur les règles de base comme la majuscule au début des phrases, l’orthographe, la concordance des temps, les accords des participes, etc. Plus aucune rigueur dans le langage, donc plus aucune rigueur dans l’approche du monde voire dans la morale. En philosophie de la communication, ce lien est légitimement établi entre la morale et le langage. Nous devons y réfléchir.
3. L’ordre du jour par les médias
Le pape Jean-Paul II l’avait bien compris. Dans l’encyclique Redemptoris missio, il a écrit :
« Le premier aréopage des temps modernes est le monde de la communication, qui donne une unité à l'humanité en faisant d'elle, comme on dit, ‘un grand village’. Les médias ont pris une telle importance qu'ils sont, pour beaucoup de gens, le moyen principal d'information et de formation; ils guident et inspirent les comportements individuels, familiaux et sociaux. Ce sont surtout les nouvelles générations qui grandissent dans un monde conditionné par les médias. (Redemptoris missio, 37 c)
Vous l’avez entendu : les médias guident et inspirent les comportements, surtout des jeunes.
L’accompagnement spirituel peut donc se trouver ainsi dans une concurrence. Dans ce vaste monde, les jeunes vont où leur cœur balance. Et la formation devient exigeante parce qu’il faut parfois aller à contre-courant dans le vaste monde qui pourvoit tous les goûts de la nature et qui ne sont pas toujours chrétiens, évangéliques.
Nous devons même reconnaître que le système médiatique mondial est dominé par le paganisme. C’est pourquoi l’Eglise se donne pour tâche d’évangéliser la culture des médias. Le paysage médiatique de la RDC, par exemple, n’offre pas beaucoup d’espace d’intériorisation de la foi catholique. Nos médias ne sont pas toujours à la hauteur de leur vocation professionnelle, et les nombreuses radios et télévisions des autres Eglises vous permettent rarement de trouver des espaces de prière digne et des voies d’intériorisation. Le bruit qu’elles diffusent est peu propice à favoriser une pratique spirituelle comme la nôtre qui tient le silence en haute estime. La chanson religieuse dominante qui se fredonne jusque dans nos couvents est celle de ces Eglises du réveil, mais les paroles ne reviennent trop souvent à l’exaltation de l’égocentrisme, laissant peu de place à Dieu souverain.
Que le monde soit un grand village grâce aux nouvelles technologies de l’information et de la communication, on peut le percevoir dans l’organisation et la tenue même du présent colloque. On notera par exemple le thème de l’homosexualité décliné sous trois angles. On a bien reconnu que l’homosexualité se pratique à un pourcentage très faible dans notre société. Mais branchés comme nous sommes, par satellite, sur l’actualité en Occident et en France particulièrement grâce à RFI, TV 5, Euro News et France 24, sans parler de l’internet, nous nous sentons comme obligés de marcher nous aussi dans la manifestation contre le « mariage pour tous ». La puissance des médias trouve ici son illustration dans ce qu’on appelle l’ordre du jour, l’agenda-setting. Les médias n’imposent aucune opinion, mais ils imposent les sujets, les thèmes à l’ordre du jour, les sujets dont vous parlerez, pour dire que vous êtes pour ou contre.
Or, l’Afrique fait montre d’une grande capacité à avaler ce que d’autres ont mâché, à consommer les idées digérées par l’Occident dans ce qui s’appelle du beau nom de « mondialisation ». Bientôt, ce sont des organisations de défense des droits de l’homme qui viendront vous convaincre que l’homosexualité est un droit de l’homme à défendre mais surtout à brandir pour être politiquement correct dans la « communauté internationale ».
Pour résister, il faut se convertir, renaître dans l’ère de la communication. Il faut organiser la résistance dans les esprits et dans les cœurs. C’est par la formation.
Notre appartenance au village planétaire ne va donc pas sans condition. De même, nous avons besoin de savoir comment nous comporter dans l’Eglise Famille de Dieu dans l’ère de la communication. Il n’est pas impossible que notre façon de vivre en Eglise et en communautés religieuses se modèle insidieusement sur la logique imposée par les nouvelles technologies de l’information et de la communication.
4. Communauté religieuse dans l’ère de la communication
La vie fraternelle des consacrés en communauté doit être un sacrement, un signe efficace pour l’Eglise et pour le monde. Dans l’ère de la communication, l’égoïsme, l’égocentrisme, le tribalisme et autres particularismes sapent jusqu’aux fondations de la vie commune et compromettent la croissance de la société vers plus de solidarité. Les consacrés sont des prophètes pour renverser l’ordre du jour injuste que le péché vient imposer à l’humanité. Mais c’est grâce aux médias aussi que les consacrés peuvent relever le défi.
La communication peut favoriser ou défavoriser la communion, l’unité des cœurs et des esprits, construire ou détruire la communauté. L’accompagnement spirituel porte essentiellement sur la relation bonne ou mauvaise entre les personnes.
Nous savons tous profiter du téléphone et de l’internet pour échanger les nouvelles dans nos congrégations. Un chapitre général tenu en ce siècle en Europe, on y participe où que l’on soit et qui que l’on soit, même si on n’y est pas physiquement, même si on n’y est pas comme délégué.
L’usage des nouvelles technologies de la communication a facilité l’information et la communication dans les congrégations, les provinces et les communautés, et la communauté se solidifie à mesure que l’on partage les mêmes sentiments, les joies et les peines.
Je n’en dirai pas autant d’une communauté locale dont les membres sont rassemblés sous un même toit. Vous n’irez pas recourir au téléphone et à l’internet pour communiquer de façon ordinaire avec votre voisin de chambre. Au contraire, les moyens de communication peuvent même parfois perturber la vie de la communauté. Lorsqu’on brise le silence et les temps de prière ou des moments de rencontre, par exemple. Ce n’est pas seulement le cas lorsqu’on est accroché à l’internet ou à la télévision, mais il suffit parfois de la sonnerie de votre téléphone à l’endroit et au moment inopportuns pour que vous péchiez contre la vie en communauté.
Parlons de la télévision. Autrefois, la communauté se rassemblait autour de la télévision, à une heure donnée pour suivre les nouvelles du village mondial ou du pays.
Le poste téléviseur occupait la salle communautaire. Les heures du journal télévisé était strictes. Il ne serait venu à personne l’idée d’avoir un poste téléviseur dans sa chambre. Aujourd’hui, les choses changent. Je connais une communauté religieuse de sept membres, qui compte six postes de télévision. Chacun regarde la télé dans sa chambre.
Autrefois, il n’y avait pas vraiment besoin de se disputer la télécommande pour la seule chaîne qui existait, mais il fallait savoir si on passe toute la récréation à regarder la télévision ou si on l’éteint pour s’écouter, s’entendre raconter aussi la vie, les événements de la journée.
On peut se poser bien d’autres questions semblables pour l’usage des autres moyens de communication : le téléphone, l’internet… qui sont véritablement de nouvelles technologies. Comment les utiliser dans le sens d’une croissance dans la vie communautaire de la vie consacrée ?
Parlant comme je viens de le faire, on plaide pour la communauté, pour le bien commun. Mais comment des personnes irresponsables pourraient-elles veiller à la qualité de la vie communautaire ? Il faudrait que les individus aient trouvé leur chemin personnel dans la foi. Et cela n’est pas possible si les nouvelles technologies de l’information et de la communication les empêchent d’accéder à ce chemin de l’intériorité. L’accompagnement spirituel doit montrer le chemin non seulement vers la communauté mais aussi vers le plein épanouissement de l’individu. Que la foule n’étouffe pas le petit Zachée dans sa recherche de Dieu ! Comment la vie communautaire, gagnée sur l’effort contre l’égoïsme, n’étouffe-t-elle pas l’individu ? Parlons de la vie privée.
5. Vie privée et vérité d’autrui
En s’inspirant du décret conciliaire Inter mirifica, le Catéchisme de l’Eglise catholique rappelle que « les moyens de communication sociale (en particulier les mass media) peuvent engendrer une certaine passivité chez les usagers, faisant de ces derniers des consommateurs peu vigilants de messages ou de spectacles. Les usagers s’imposeront modération et discipline vis-à-vis des mass media. Ils voudront se former une conscience éclairée et droite afin de résister plus facilement aux influences moins honnêtes » (CEC, 2496)
Le Catéchisme relève aussi les devoirs des autorités civiles en raison du bien commun. Autant les pouvoirs publics doivent protéger la vraie et juste liberté de l’information en raison du bien commun, autant ils doivent sanctionner la violation des droits de chacun à la réputation et au secret de la vie privée. (CEC, 2498).
Voilà un domaine pour l’accompagnement spirituel. On a affirmé depuis le début de ce colloque l’importance de la discrétion comme vertu cardinale pour cette pratique de la vie de l’Eglise. Parce qu’on touche la conscience et l’inviolabilité de la conscience.
L’importance de l’accompagnement spirituel dans la vie consacrée dans l’ère de la communication devra porter aussi sur la question de la vérité. La vérité vous rendra libres, a dit Jésus. Mais les implications du huitième commandement de Dieu sont plus concrètes qu’on ne croit pour rendre justice à autrui. Le pape François les a abordées récemment.
Lors de la messe matinale du samedi 18 mai, le pape a indiqué cinq péchés à éviter lorsqu’on parle d’autrui. Le pape commentait la question de Pierre à Jésus concernant Jean. Pierre avait demandé : « Et lui, que lui arrivera-t-il ? » « Si je veux qu’il reste jusqu’à mon retour, est-ce ton affaire ? » (Jean 21,20-25). Le pape François relève cinq façons de communiquer destructrices de l’Eglise, de la communauté chrétienne, cinq façons de tuer son frère par la langue et de donner une gifle à Jésus à travers ses frères : la comparaison, le « potin », la désinformation, la diffamation et la calomnie.
L’internet est réputé comme lieu de la rumeur. Mais, malheureusement, on a tendance à prêter foi à tout ce qui en sort. Notre esprit critique est mis à l’épreuve. Beaucoup ont ainsi été victimes de cyberescrocs, de cybercriminels qui leur font miroiter monts et merveilles, avec ces inconnus qui vous font gagner comme en rêve d’importantes sommes d’argent tout simplement parce que votre nom leur a plu ou que votre adresse électronique a été tirée a sort. Des communautés religieuses et des individus se sont appauvris pour avoir cédé à l’appât de la richesse vantée par des menteurs. Des personnes qui ont parlé de promesses en accompagnement spirituel ou simplement entre amis ont été sauvées !
L’internet, lieu de la rumeur et lieu de l’escroquerie. L’internet est aussi un lieu du sexe facile. Des racolages sur facebook aux images pornographiques. Les sites internet les plus visités sont les sites pornos. Mais on me dit que la pornographie est un vice plutôt masculin !
On doit aussi insister sur le respect de la vie privée en rappelant le bon vieux principe du secret de la correspondance. On n’écrit plus de lettres, mais on envoie des courts messages, des sms ou des e-mails. Il faut savoir respecter la vie d’autrui en évitant de répondre au téléphone à sa place et surtout de lire ses messages sur téléphone ou son courrier électronique.
Des questions pareilles semblent délicates à la lumière des enjeux éthiques. Un chemin d’intériorité peut se dégager ici.
6. Accompagnement spirituel, chemin d’intériorité
Le véritable enjeu de l’accompagnement spirituel dans l’ère de la communication, c’est l’éducation à l’intériorité. Il ne s’agit pas nécessairement d’une vertu spirituelle. Il s’agit d’abord d’une capacité humaine, de tout homme à se ressaisir, à se recueillir en tant que personne unique ouverte aux autres. C’est lorsque cette ouverture se fonde sur la foi que nous pourrons l’appeler spirituelle au sens religieux et chrétien et au sens de la vie consacrée.
Compris comme éducation à l’intériorité, l’accompagnement spirituel nous apparaît alors comme cet acheminement vers la rencontre avec soi-même et la rencontre avec Dieu. Il s’élève comme un combat avec soi-même et avec Dieu.
Les nouvelles technologies de l’information et de la communication convoient (charrient) beaucoup de bruit, la rumeur du monde en même temps qu’elles nous font partager le sort de l’humanité. Nous pouvons y rencontrer ce Dieu qui a planté sa tente parmi nous et nous invite à le rencontrer, à le reconnaître. C’est la croissance dans la vie spirituelle. Pour y parvenir, il faut plonger plus loin, plus à fond dans l’épaisseur du monde, il faut la traverser. Dans l’ère de la communication, il faut non éviter les médias, mais s’y plonger comme dans un bain et en sortir dans une meilleure connaissance et réalisation de soi-même.
Comment traverser les médias comme symbole de l’épaisseur du monde ? C’est par la pratique des médias comme utilisateur ou producteur et par la prise de distance critique qui ne peut advenir que par la formation multiforme à la culture médiatique.
Ici comme ailleurs, que les aveugles ne prétendent pas en guider d’autres. Il convient que les formateurs, les accompagnateurs spirituels appartiennent au même siècle que les accompagnés, qu’ils partagent un minimum d’éléments de cette culture induite par les moyens de communication modernes. Nous sommes justement ici en pleine formation des formateurs. Permettez-moi de suggérer qu’il faut aux formateurs d’aujourd’hui une formation à la culture médiatique. N’ayez pas peur.
La formation à la culture médiatique ne consiste pas d’abord à vous aider à manier des instruments. Il s’agit de vous ouvrir les yeux sur les enjeux et les défis de la communication dans la croissance de la foi.
Lorsque vous aurez été formés vous-même, vous serez en mesure d’aider les jeunes à une lecture critique des médias, à retrouver la responsabilité et la liberté et à comprendre le lien entre communication, communion et communauté.
Conclusion
Les nouvelles technologies de l’information et de la communication induisent une nouvelle manière de comprendre, de croire, d’aimer, de faire, de parler. Les formateurs peuvent ainsi s’étonner aujourd’hui, au niveau éthique et intellectuel, de la relativisation ou du relativisme (à chacun sa vérité), de la liberté (autonomie du sujet), de la dispersion (et toutes les vérités se valent). Au niveau de la foi, vous ne pouvez pas comprendre autrement que vos jeunes confondent les Eglises, que du point de vue idéologique ou intellectuel, ils fustigent les sectes religieuses alors que la musique de ces Eglises est celle qu’ils reprennent.
Il faut le discernement. Et l’accompagnement spirituel peut porter sur ce domaine-là aussi, n’est-ce pas ?
Merci Zia pour cette précieuse réflexion. Beaucoup de réponses concernant le défi de la vie fraternelle dans nos sociétés de consommation et de NTIC/culture numérique.
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